L'aplasie d'oreille est une malformation de l'oreille externe et/ou moyenne présente à la naissance (congénitale).
Il existe deux formes d'aplasie d'oreille :
Elles peuvent être d’origine génétique, ou environnementale.
Le plus souvent, elles sont isolées, c'est à dire qu'elles sont présentes sans qu'aucune autre malformation n'y soit associée et peuvent apparaître d'un côté : unilatérales ou des deux côtés : bilatérales.
Parfois, elles sont présentes en même temps que d'autres malformations et font alors partie d’un syndrome malformatif, tels que la microsomie craniofaciale, le syndrome de Treacher-Collins (Franceschetti ou dysostose mandibulo-faciale), le syndrome CHARGE, le syndrome de microdélétion 22q11, le syndrome de Nager ou dysostose acrofaciale, le syndrome de Genée-Wiedemann, le syndrome de Townes-Brocks, le syndrome BOR (branchio-oto-rénal), les trisomies 8, 13, 18 et 21.
La prise en charge globale du patient et de sa famille repose sur une coopération pluridisciplinaire de professionnels avec l'intervention, selon les besoins de : chirurgien ORL et cervico-facial, chirurgien plasticien, ORL audiophonologiste, chirurgien maxillo-facial, audioprothésiste, orthophoniste, psychologue, prothésiste/épithésiste, pédiatre (chez l’enfant), infirmière spécialisée.
Dans les formes syndromiques, les professionnels des spécialités médicales et para-médicales des autres organes ou systèmes affectés sont également impliqués : dermatologue, ophtalmologue, neurologue, orthophoniste, kinésithérapeute, psychomotricien, etc.
Les patients atteints d'aplasie d'oreille peuvent être pris en charge dans les Centres de Référence et de Compétence MALO.
L'aplasie mineure d’oreille est une malformation des osselets de l’oreille moyenne avec peu ou pas de malformations du pavillon. Cette anomalie provoque un déficit auditif léger à moyen (la voix forte est perçue comme un chuchotement).
Les différentes parties de l'oreille : de l'extérieur à gauche vers l'intérieur à droite : le pavillon de l'oreille, le conduit auditif (en rouge), fermé par le tympan, les osselets (en bleu) et l'oreille interne (en vert).
Aplasie mineure d'oreille avec sténose partielle du conduit auditif externe et osselets anormaux
L’aplasie mineure d'oreille concerne 1 sur 10 000 à 20 000 naissances.
Dans 15 % des cas, plusieurs membres d’une même famille ont la même anomalie. Parfois, l’aplasie mineure peut être héréditaire.
L'aplasie mineure peut concerner soit une oreille : elle est dite unilatérale, soit les deux oreilles : elle est dite bilatérale (30 à 40 % des cas).
Parfois, l’aplasie mineure d’oreille peut s’accompagner d'un(e) :
anomalie de la forme du pavillon
rétrécissement du conduit auditif
diminution de la taille du tympan ou son ossification partielle.
L’aplasie mineure d’oreille peut parfois ne pas être isolée et s'accompagner d'anomalies d’autres organes tels que le rein, le cœur, les yeux, la colonne vertébrale, etc. dans le cadre d’un syndrome.
Le diagnostic de cette malformation peut être fait dès la naissance ou avant la fin du 3e mois dans le cadre du dépistage auditif systématique.
Il peut également être fait plus tardivement, au cours des premières années de vie, en constatant une malformation mineure du pavillon ou, dans une forme bilatérale, en suspectant une gêne auditive.
Cela peut être encore plus tardif en remarquant, par exemple, que l’enfant utilise préférentiellement une oreille (il porte le téléphone toujours du même côté).
Différents examens permettent de diagnostiquer l’aplasie mineure d’oreille :
Oto-émissions acoustiques (OEA)
Potentiels évoqués auditifs automatisés (PEAA)
Potentiels évoqués auditifs standards (PEA)
Examen audiométrique adapté à l’âge de l’enfant
Une consultation avec un psychologue peut être proposée au moment du diagnostic.
La prise en charge de l’aplasie mineure d’oreille bilatérale peut comporter des séances d’orthophonie et un appareillage auditif bilatéral pour assurer une acquisition du langage et une scolarité normales à l'enfant.
Lorsque l'aplasie mineure d'oreille est unilatérale, la mise en place d'un appareillage n'est pas systématique et dépend de la gêne au quotidien, des possibilités d'appareillage (selon l'état du conduit auditif : normal ou étroit), et des seuils auditifs de l'autre oreille. Il est nécessaire de surveiller l'audition et le tympan de l'oreille saine au moins une fois par an, pour vérifier qu'il n'y a pas de problème d'otites séreuses durant les premières années de l'enfant, susceptibles de perturber son audition globale.
Un suivi ORL, au minimum annuel, est nécessaire. Parfois, un scanner de l’oreille est proposé lorsque le diagnostic d’aplasie mineure est posé, le plus souvent à partir de l’âge de 4 -5 ans, pour faire le bilan de l’anomalie. Un généticien est souvent consulté pour rechercher la cause de l’aplasie.
Une chirurgie correctrice de la malformation des osselets ou une chirurgie plastique du pavillon peuvent être envisagées respectivement à partir de 6 ans et à partir de 9 à 10 ans.
L'aplasie majeure d’oreille est une malformation du pavillon de l’oreille, qui est absent (anotie) ou très anormal (microtie), à laquelle s’associe, presque toujours, un déficit auditif.
Les différentes parties de l'oreille : de l'extérieur à gauche vers l'intérieur à droite : le pavillon de l'oreille, le conduit auditif (en rouge), fermé par le tympan, les osselets (en bleu) et l'oreille interne (en vert).
Aplasie majeure d'oreille avec malformation du pavillon de l'oreille, absence du conduit auditif externe et du tympan, et osselets anormaux
L’aplasie majeure touche environ 1 enfant sur 10 000.
L’aplasie majeure peut ne toucher qu’une seule oreille et ne pas être associée à d’autre symptôme : il s’agit alors d’une aplasie majeure unilatérale isolée.
Les causes des aplasies majeures unilatérales isolées ne sont pas encore bien identifiées et il est conseillé de faire une consultation de conseil génétique auprès d’un généticien clinicien (avec un examen clinique complet, le recueil d’antécédents de la famille et la recherche d'une cause héréditaire connue).
En cas de premier enfant avec une aplasie dans la famille, le risque d’avoir un autre enfant porteur d’une aplasie ou d’une malformation d’oreille est très faible, mais un peu plus important que dans la population générale : 1 / 1 000 (au lieu de 1 / 10 000 dans la population générale).
Lorsqu’elle concerne les deux oreilles (aplasie majeure bilatérale), ou qu’elle est associée à d’autres anomalies, il est souvent possible de faire le diagnostic précis du syndrome.
La consultation de génétique est conseillée pour savoir si ce syndrome peut se transmettre dans la famille et décider des modalités de suivi pour une autre grossesse.
L’aplasie majeure d’oreille n’est pas toujours visible à l’échographie de grossesse et peut donc parfois être découverte à la naissance.
Dans les cas les plus fréquents, le conduit auditif est absent et provoque un déficit auditif moyen (la voix forte est perçue comme un chuchotement).
L’oreille interne est habituellement normale et, même en l’absence de conduit auditif, le son parvient à l’oreille par les vibrations des os et des cartilages de la tête.
L’organe de l’équilibre est habituellement normal.
En cas d’aplasie majeure unilatérale isolée (une oreille normale et sans malformation associée), la surveillance de l’audition et du tympan normal est annuelle pendant les premières années, pour vérifier qu’il n’y a pas de problème d’otite séreuse risquant de perturber l’audition globale de l’enfant.
Le suivi consiste en une surveillance du fonctionnement de l’oreille non atteinte par des tests auditifs adaptés à l’âge (oto-émissions acoustiques (OEA), potentiels évoqués auditifs (PEA)).
Habituellement, il n’est pas proposé d’appareillage ou de séances d’orthophonie chez le petit enfant dont le conduit auditif est absent dans une oreille et avec l'autre oreille normale, sans otites récidivantes.
Afin d'obtenir une audition des deux oreilles en même temps (binauralité), une réhabilitation de l'audition par une prothèse à conduction osseuse ou un implant d'oreille moyenne peut être discutée.
En cas d'aplasie majeure bilatérale, la réalisation des PEA permettra de contrôler le fonctionnement de l'appareil auditif en profondeur.
Des examens complémentaires seront effectués pour s’assurer que l’aplasie n’est pas associée à d’autres symptômes (échographie du rein, du cœur, radiographie de la colonne vertébrale, examen des yeux).
Un appareillage auditif sera systématiquement mis en place entre l'âge de 3 et 6 mois : sur bandeau ou serre-tête dans un premier temps, puis chirurgicalement à partir de 5-6 ans.
En cas d’aplasie majeure associée à une malformation ou à des problèmes d’otites sur l’autre oreille, il peut être nécessaire de proposer un appareillage auditif soit sur l'oreille qui est extérieurement normale, soit par un appareil fixé par un bandeau ou serre-tête.
Un suivi orthophonique est toujours associé pendant les premières années de vie.
Suivi pendant les premières années de vie :
Suivi ORL annuel au minimum
Scanner de l’oreille parfois pendant les premiers mois de vie, mais le plus souvent à partir de 4 à 5 ans, pour faire le bilan de la malformation
Surveillance du bon développement de la face et de la mâchoire avec une consultation auprès d’un chirurgien maxillo-facial
A la pré-adolescence, avis orthodontique fortement conseillé.
En présence d’un conduit auditif même de petite taille, une chirurgie du conduit, du tympan et des osselets peut être proposée, à partir de 5-6 ans, pour améliorer l’audition si toutefois les conditions au scanner sont bonnes.
En l'absence totale du conduit, la chirurgie ne donne pas des résultats satisfaisants et n’est donc pas proposée.
La chirurgie plastique du pavillon (otopoïèse) peut se faire, selon leurs formes, à partir de l’âge de 10 ans. L’intervention est effectuée en deux temps, espacés de six à neuf mois, et consiste à reconstruire le pavillon de l’oreille avec du cartilage prélevé à partir des côtes mais elle ne restaure pas l’audition de l’oreille aplasique.
Il existes des alternatives, telles la reconstruction par polyéthylène poreux haute densité (Medpor® ou Supor®) ou l'épithèse de pavillon, qui sont à discuter avec le chirurgien.
- La reconstruction par polyéthylène poreux consiste en l'utilisation de deux pièces modelées par le chirurgien, qui sont ensuite recouvertes par un lambeau temporo-pariétal puis par des greffons cutanés.
Cette chirurgie peut se proposer dès l’âge de 3 à 5 ans.
- L’épithèse de pavillon consiste en la pose d’une prothèse externe en silicone, qui peut être attachée avec des adhésifs ou de la colle chez le patient jeune, et fixée chez l’adulte par des implants à ancrage osseux ou des aimants.
Innovations dans la prise en charge des aplasies d'oreille
(otopoïèse et implants auditifs)
par le Dr Charlotte Célerier
Journée "Recherche et Innovation" TETECOU
mars 2021
- Prise en charge par l'Assurance Maladie
Les patients atteints d'aplasie d'oreille peuvent bénéficier des dispositifs de remboursement des soins par l'Assurance Maladie dans le cadre des affections de longue durée (ALD).
En cas d’aplasie avec surdité bilatérale, la mise en place d’une ALD est nécessaire le plus tôt possible.
En cas d’aplasie unilatérale avec audition controlatérale normale, l’ALD sera mise en place surtout si un appareillage est décidé, ou pour aider la prise en charge des transports vers un centre de référence.
Pour les appareils classiques en conduction aérienne, chez l’adulte de 20 ans et plus, l’Assurance Maladie rembourse 120 € par appareil, les complémentaires santé 350 € en moyenne, soit 470 € au total.
Le coût moyen d’une audioprothèse en voie aérienne, toutes gammes confondues, est de 1535 €.
Le remboursement est complet depuis 2021 grâce à la réforme 100% santé audiologie 2019-2021, chez l’adulte et l’enfant, que la surdité soit uni ou bilatérale, pour une gamme étendue d’appareils (contour d’oreille, intra conduit, appareil à écouteur déporté) à garder au minimum 4 ans, avec un mois d’essai et 2 réglages par an.
Consulter les informations sur le site solidarites-sante.gouv.fr
Pour une prothèse en conduction osseuse, le coût allait jusqu’à 4200 €, comprenant l’appareil lui-même, la prestation initiale (analyse, adaptation de l’appareil et réglages) et le suivi prothétique étalé sur 5 ans en moyenne.
Depuis novembre 2019, le remboursement des appareils en conduction osseuse Baha® (CochlearTM) et Ponto® (Oticon MedicalTM) est complet et le renouvellement si nécessaire possible tous les 2 ans
- Prise en charge par la MDPH
La Maison Départementale des Personnes Handicapées (MDPH) est utile si des aménagements particuliers, notamment scolaires, sont nécessaires (demande d’Accompagnant d'Elèves en Situation de Handicap, AESH, de micro HF).
De même, le dossier MDPH doit être réalisé pour les aplasies d’oreille s’intégrant dans des syndromes poly-malformatifs dont la prise en charge engendre un surcoût important pour les familles.
Une aide financière peut alors être apportée par le biais de l’AEH (allocation enfant handicapé).
L’AEH ne sera pratiquement jamais accordée quand l’audition d'une oreille est normale, ou même si elle est anormale mais avec une perte auditive inférieure à 60 dB.
Il faut alors bien mentionner les retentissements existants (sur le langage ou psychologiques) ou les pathologies associées qui motivent la demande d’AEH.
Consulter les informations sur le site de la CNSA
- Le soutien associatif
Des groupes de soutien peuvent aider les enfants et leur famille à faire face à la différence, promouvoir la confiance, la résilience et une image de soi positive.
Il peut s'agir de familles ressources, d’associations de parents d’enfants atteints de la pathologie, d’associations concernant un syndrome avec aplasie majeure, ainsi que de groupe de patients avec aplasie sur les réseaux sociaux.
Il existe également les centres d’information sur la surdité.
Microtie
Aplasie/hypoplasie du conduit auditif externe
Illustrations réalisées par Cassandra Vion, illustratrice scientifique et médicale www.cassandravion.com. Droits cédés exclusivement pour le site internet de la Filière de Santé Maladies Rares de la Tête, du Cou et des Dents (TETECOU) et de ceux de ses centres de référence (CRANIOST, MAFACE, MALO, SPRATON) qu’il héberge