Le syndrome de Van der Woude est une maladie génétique rare, présente à la naissance (congénitale).
Il se caractérise par la présence de dépressions de la lèvre inférieure (fistules labiales), associées à une fente labiale, palatine ou labio-palatine.
Il s'agit du syndrome le plus fréquent présentant une fente labiale et/ou palatine (1 à 2% des personnes porteuses d'une fente).
Il affecte 1 personne sur 35 000 à 100 000.
Le gène IRF6
Des mutations du gène IRF6 (situé sur le chromosome 1, en position 1q32.2-q32.3) codant pour le facteur de transcription IRF6 (interferon regulatory facteur 6) sont le plus souvent à l'origine du syndrome de Van der Woude (plus de 70% des cas).
Au cours de la constitution de l'embryon puis du foetus, la protéine IRF6 contrôle le développement craniofacial (du crâne et du visage). Elle est également impliquée dans la formation de l'épiderme de la peau et celle des organes génitaux.
Les mutations du gène IRF6 engendrent la production d'une protéine IRF6 plus petite (tronquée), qui n'est plus capable de remplir ses fonctions.
Le syndrome se transmet héréditairement selon le mode autosomique dominant, c’est-à-dire que si l’un des parents est atteint, donc porteur d’une copie du gène muté et d’une copie du gène normal, la probabilité pour ses enfants d’être affectés du syndrome est de 50 % que ce soit une fille ou un garçon.
Les personnes atteintes du syndrome de Van der Woude ont donc le plus souvent un de leurs deux parents affectés, mais avec des manifestations qui peuvent être très légères et passées inaperçues.
On dit parfois que la pénétrance du syndrome est forte mais incomplète ; cela signifie que la grande majorité des personnes porteuses de la mutation seront affectées du syndrome mais pas toutes. Cependant, un examen attentif de ces personnes montrera généralement des atteintes très légères du syndrome.
Dans certains cas, les parents de la personne affectée du syndrome ne sont pas porteurs eux-mêmes d'une mutation du gène IRF6 ; la mutation s'est produite pendant le développement de l'embryon. On dit qu'il s'agit d'une mutation de novo.
Par ailleurs, des mutations du gène IRF6 peuvent être à l'origine d'autres maladies rares :
Le gène GRHL3
Plus rarement (5% des cas), le syndrome de Van der Woude est causé par des mutations du gène GRHL3 (situé sur le chromosome 1, en position 1p36) codant pour la protéine GRHL3 (grainyhead-like protein 3 homolog). Il s'agit d'un facteur de transcription impliqué dans le contrôle du développement de l'embryon, plus particulièrement au niveau de la formation de la peau, du visage et du système nerveux.
Un gène modificateur
De plus, des mutations d'un gène situé sur le chromosome 17 (position 17p11.2-p11.1) pourraient être impliquées dans les manifestations du syndrome de Van der Woude. Elles ne sont pas à l'origine elles-mêmes du syndrome, mais en modifieraient les signes cliniques et leurs sévérités (gène modificateur). Cela expliquerait pourquoi les personnes porteuses de la même mutation du gène IRF6 ou GRHL3 (gènes principaux) ne sont pas toutes atteintes de la même manière (expressivité variable).
Le syndrome de Van der Woude est à l'origine de plusieurs manifestations, qui peuvent être extrêmement variables, même chez les personnes d'une même famille :
Environ 70% des personnes affectées du syndrome de Van der Woude présentent à la fois des fistules labiales et une fente.
25% des personnes atteintes du syndrome n'en ont que des manifestations mineures, telles que une hypodontie isolée, ou seulement de lègères encoches de la lèvre inférieure.
Les fistules labiales
Les fistules labiales sont des petits canaux présents au niveau de la lèvre.
Elles n'occasionnent le plus souvent aucun symptôme. Parfois, elles peuvent s'infecter. D'autres fois, elles comprennent des glandes muqueuses ou salivaires, de sorte qu'un peu de mucus ou de salive peut s'en écouler.
Il y a le plus souvent deux fistules, de part et d'autre du milieu de la lèvre (fistules paramédianes bilatérales) ; rarement, une seule fistule est présente. Elles sont plus ou moins profondes.
La fente labiale, palatine ou labio-palatine
Les personnes atteintes du syndrome de Van der Woude sont le plus souvent porteuses d'une fente labiale, mais il peut également s'agir d'une fente palatine ou d'une fente labio-palatine.
La sévérité de la fente est très variable : il peut s'agir d"une luette bifide (rarement), d'une fente palatine sous-muqueuse (dont le diagnostic peut être plus difficile à réaliser), d'une fente labiale unilatérale ou bilatérale, d'une fente labio-palatine.
Occasionnellement, la fente est la seule manifestation du syndrome.
L'hypoplasie des tissus
Le syndrome de Van der Woude s'accompagne d'une hypoplasie, c'est-à-dire d'un développement insuffisant, des tissus mous (peau, muqueuse, muscles) et de l'os.
En particulier, l'os de la mâchoire supérieure (maxillaire) est généralement peu développé.
L'agénésie dentaire
Des dents sont généralement absentes. Il s'agit le plus souvent des deuxièmes prémolaires (inférieures ou supérieures) et/ou des incisives latérales supérieures.
Occasionnellement, l'agénésie dentaire est la seule manifestation du syndrome.
Le diagnostic du syndrome de Van der Woude est le plus souvent clinique, suggéré par l'association d'une fente labiale et/ou palatine et de fistules labiales, ainsi que par l'histoire familiale (personnes déjà diagnostiquées pour le syndrome de Van der Woude dans la famille, ou en présentant des manifestations).
La présence des fistules labiales est caractéristique de ce syndrome, mais peut également être retrouvée dans le syndrome des ptérygiums poplités autosomique dominant, causé lui-aussi par le gène IRF6, ou dans le syndrome oro-facio-digital.
Il peut être confirmé par des tests génétiques, recherchant des mutations du gène IRF6, qui en sont le plus souvent responsables, ou du gène GRHL3.
La prise en charge du syndrome de Van der Woude, depuis la période anténatale jusqu’à son suivi dans l’enfance et à l’âge adulte, doit toujours être multidisciplinaire.
Elle est coordonnée par un centre de référence, un centre de compétence ou un centre expert, en collaboration avec le médecin traitant, et fait intervenir différents professionnels de santé : échographiste de dépistage (gynécologue, sage-femme, radiologue), échographiste de référence, obstétricien, sage-femme, chirurgien maxillo-facial, plasticien ou chirurgien pédiatre avec des compétences en chirurgie plastique, anesthésiste pédiatrique, généticien, pédiatres de spécialité (en cas d'anomalie(s) associée(s)), néonatalogiste, ORL, pédodontiste, orthodontiste, orthophoniste, psychologue/psychiatre, infirmier, prothésiste, puéricultrice et auxiliaire de puériculture, assistant social.
La prise en charge de la fente labiale et/ou labio-palatine
Le traitement de la fente est fonction du type de fente, et comprend des temps de réparation chirurgicale, accompagnés d'un suivi et d'une prise en charge orthodontiques, orthophoniques, ORL ...
Cette prise en charge peut être plus compliquée que celle d'une fente isolée du fait du syndrome, et notamment du développement insuffisant (hypoplasie) de l'os et des tissus. Un agrandissement chirurgical de la mâchoire supérieure (distraction maxillaire) peut être nécessaire.
La prise en charge des fistules labiales
Les fistules labiales peuvent être retirées chirurgicalement (exérèse), que ce soit pour des raisons esthétiques ou pour supprimer l'écoulement de mucus ou de salive.
Cette reconstruction de la lèvre inférieure peut nécessiter des greffes de peau, prélevées sur une autre partie du corps.
La prise en charge de l'agénésie dentaire
Une réhabilitation prothétique et implantaire peut être mise en oeuvre afin de remplacer les dents manquantes.
Des programmes d'Éducation Thérapeutique du Patient peuvent être proposés aux personnes atteintes du syndrome de Van der Woude :
- "Éducation thérapeutique pour la prévention des complications et l'amélioration de la qualité de vie des enfants atteints de malformations de la face et de la cavité buccale" (Hôpital Necker)
- "Parcours d'éducation thérapeutique des enfants porteurs d'une fente labiale et/ou palatine et de leurs parents" (Clinique du Val d'Ouest, Ecully)
- « E…change de regard » : programme destiné aux enfants ayant une maladie rare et souffrant du regard des autres.
Des ateliers éducatifs, sur l'alimentation ou sur l'estime de soi par exemple, ou des rencontres avec d'autres parents ou enfants peuvent également être organisés.
Mise en place d’ateliers « Estime de Soi » dans le cadre d’une consultation pluridisciplinaire des fentes labio-palatines ou autres pathologies à risque de stigmatisation sociale par le Dr. Isabelle James (Centre de Compétence MAFACE de la Clinique du Val d'Ouest, Ecully)
Les personnes atteintes du syndrome de Van der Woude doivent être prises en charge par :
les Centres de Référence et de Compétence des Fentes et Malformations faciales (MAFACE)
les Centres de Référence et de Compétence des Malformations ORL rares (MALO), pour le suivi et la prise en charge des otites, et la surveillance de l'audition
les Centres de Référence et de Compétence des Maladies Rares Orales et Dentaires (O-Rares), pour les anomalies dentaires associées
les Centres de Référence et de Compétence Maladies Rares des Syndromes de Pierre Robin et Troubles de Succion-Déglutition Congénitaux (SPRATON), en cas de difficultés alimentaires importantes.
En partenariat avec l’Agence Française de l'Adoption, les professionnels du Centre de Référence accompagnent les personnes envisageant l'adoption d'un enfant porteur d'une fente labiale et/ou palatine :
Fentes labiales et/ou palatines
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